Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
24 avril 2012 2 24 /04 /avril /2012 23:32

 

Comingout_visconti-les-damnes.jpg 

 

Le comité rédactionnel de Freakosophy sont des amis, et ils marchent au perrier menthe ou au café, qu'on prend dans un petit salon de thé pour éprouver la pertinence de nos intuitions intellectuelles – pour être plus précis : dans une salle encombrée de mères de famille, de berceaux, et de grands mère du centre-ville disant du mal de leur bru tout en grignotant de petits gâteaux qui leur rappelle le monde d'autrefois. Le test est simple : plus les tables autour de nous se clair-sèment, plus le débat intellectuel est animé... ou plutôt, pour le dire plus franchement : quand les parents prennent les enfants et se cassent, c'est généralement le signe que nous avons une conversation bien dégueulasse sur des sujets aussi dégueux.

Il en alla ainsi le lendemain de la mort de Richard Descoings, ancien directeur de Sciences Po. 

L'aimable clientèle a dû jeter des regards noirs en partant, et peut-être me maudire personnellement de vérifier si rapidement et si facilement tous les clichés concernant les pédés bobos de gauche (ce dont on a très vite l'air dans une petite ville de province). Ils devaient probablement se dire que même avec quelques brins de reconnaissance sociale et quelques idoles médiatiques déviantes, nous resterions toujours, tous, définitivement d'ingrates petites salopes – "ungrateful sonofabitches" pour reprendre le mot que Kramer s'attribue à lui-même. 

Un faisceau de causes s'était enroulé autour de notre petite conversation de café, expliquant à la fois ma position, ma rage et ma solitude... Le comité rédactionnel a décidé (dans son infinie sagesse) que ça valait la peine de faire partager cet avis marginal (ils risquent de publier prochainement ma position sur leur site), et de désenchevêtrer toutes les raisons qui me donne raison – je m'essaie au relativisme, mais sans grand succès, je le crains... Je vais donc essayer d'expliquer pourquoi je défends l'idée d'une transparence presque absolue concernant les hommes politiques, et pourquoi je défends également l'idée du coming out concernant les hommes politiques gays. Autrement dit pourquoi le paradigme français de la vie privée des hommes politiques m'exaspère, et pourquoi le coming out des hommes politique de droite tout particulièrement devrait être une pratique quasi-institutionnelle. Profitez-en, car je crois que peu de vos amis gays (de gauche) diront aussi franchement que moi ce qu'ils en pensent...

Mais avant tout : Flashback, folks !

 

 

Le contexte d'un débat de café.

 

D'abord, j'avais lu quelques mois plus tôt l'essai de Didier Lestrade "Pourquoi les gays sont passés à droite". La thèse semblait audacieuse, puisque la sociologie du vote en cette matière est toute fraîche (et on a accusé l'auteur de ne s'appuyer sur rien...), mais le livre montrait avec justesse que les gays avaient abandonné les thèmes porteurs des années 90 (coming out, lutte contre le sida, contre le racisme), et qu'ils se tournaient désormais vers des valeurs plus promptes à conserver une position dominante (leur sexualité est redevenue secrète, la lutte contre le sida est réduite à peau de chagrin, et le racisme et l'islamophobie sont monnaie courante dans la communauté). Bref, il s'agit d'une analyse du discours gay et pas uniquement du vote gay, bitches ! Les arguments de Lestrade ont été discutées encore et encore sur les réseaux sociaux, et un peu à la télé (ici, ici, ici et ici... y'a plein de super articles). Vous pouvez facilement rattraper tout ça. Si vous pensez manquer de connaissance en la matière, tapez simplement Pim Fortuyn et Jörg Haider/Stefan Petzner dans google.

En gros, Lestrade a raison. D'abord parce qu'il y a une contradiction bien connue entre exercice du pouvoir et devoir de vérité. Pour bien exercer le pouvoir, on doit avoir des secrets, savoir garder des secrets, voire même construire de toutes pièces de faux secrets. Quoi de plus antinomique donc qu'un mouvement gay qui s'appuie sur la pratique du coming out comme un acte fondateur (car, y aurait-il un mouvement gay politique si les gays eux-mêmes restaient cachés ?) et la prise du pouvoir par certains gays ? Antinomique tout au moins tant qu'on continue à suivre la veille ligne machiavélienne. Et moins antinomique si vous cherchez effectivement à faire de la politique avec plus de vérité – au passage, oui, ça donne aux gays la responsabilité de faire de la politique différemment.

Ensuite Lestrade a raison parce que sa thèse concerne plutôt la récupération du discours gay que la stricte sociologie du vote (et pourquoi seulement prendre le vote pour seule preuve d'ancrage politique ?). Son analyse se fait l'écho de deux concepts fraîchement apparus pour expliquer les nouveaux usages politiques dont le mouvement gay fait l'objet : le pink washing (rendre une cause sympathique en la présentant comme favorable aux gays) ou d'homonationalisme (se servir de la cause gay comme argument pour promouvoir un nouveau nationalisme). Dans les deux cas, il s'agit de dire que les gays sont des créatures si mignonnes et douces que ceux qui les ont dans leur équipe ne peuvent pas être de gros réactionnaires. Être gay c'est être moderne. Même les plus idiots des virilistes conservateurs sont d'accord, car eux, justement, détestent ça. Mais ce qui est surprenant, c'est que, plutôt que de les combattre, certains conservateurs de droite ont décidé de les utiliser. Et ils ont trouvé certains spécimens gay consentants pour se racheter une vertu en matière de politique identitaire et de politiques anti-discriminatoire... parmi eux : Richard Descoings.

Ajoutez à ça deux autres gros nuages planant au-dessus du débat politique français, qui donnent chacun raison à Lestrade, et vous aurez le contexte politique du débat : 

1) les féministes se sont faites récupérer depuis le débat sur la burqa. Depuis plusieurs années, suites à toute une série de faux-débat et de manoeuvres tokénistes particulièrement opportunistes, elles ont été conduites à désigner le garçon arabe comme ennemi numéro un de toute démocratie moderne. Il est étonnant qu'on ne pense même pas à parler de fémino-nationalisme alors que Marine Lepen se met à protéger les femmes en attaquant les musulmans français (il a fallu sa sortie sur l'IVG de confort pour que les féministes lui tombent dessus).

2) depuis l'affaire DSK, il n'est plus un citoyen honnête qui défende par principe la vie privée des hommes politiques. Il est maintenant évident qu'une indiscrétion un tant soit peu modérée avant le scandale nous aurait permis d'éviter de penser élire un partouzard à la tête de la belle et vierge République (et dieu sait que je n'ai rien contre les partouzards – ce sont des créatures de Dieu comme toutes les autres !).

 

 

Comingout_richard-descoings-directeur-de-sciences-po_scalew.jpg

      "l'innovation, c'est la déviance maîtrisée"

 

 

Soudain, la mort de Richard Descoings.

 

Ainsi, un beau matin, une collègue s'est fait les gorges chaudes de ce qu'elle a appris à la radio : Descoings a été retrouvé mort dans sa chambre d'hôtel et... nu (information qui sera tue au fil des flash d'infos). Un ami ajoute qu'on a retrouvé son portable une chambre en dessous. Et que tout ça paraît louche... on ne donnera finalement jamais la cause de sa mort. Puis quelques secousses internet plus tard, on lâche enfin le morceau : Descoings était manifestement gay. Le citoyen informé est alors libre d'imaginer un scénario glauque et semi-pornographique impliquant des escorts boys et des experts scientifiques récupérant des traces de sperme avec des lumières ultraviolettes en éclairant une chambre d'hôtel à moquette beige. Puis, un peu après, le même citoyen informé est appelé à compatir devant l'avalanche de billets rendant hommage aux efforts de Descoings pour moderniser Sciences Po. 

Le plus ironique a été finalement que sa mort fut aussi son coming out. Mais pourquoi y aurait-il lieu de s'indigner plutôt que de seulement ricaner, comme le fait le bon citoyen informé ? Parce que devant cette farce tragi-comique, les médias ont aussitôt cherché à relativiser la portée du coming out posthume de Descoings. 

Dans la presse, l'homosexualité de Descoings a été présentée comme un secret de polichinelle ou un détail, bien que ce détail puisse expliquer sa mort ou quelque autre bizarrerie comme la venue du patron de la SNCF, Pépi, "l'ami de la famille". Bref, personne ne le savait mais du jour au lendemain tout le monde faisait comme s'il savait. Je ne crois pas que ce soit la définition d'un secret de polichinelle – ou c'est un polichinelle au carré, où l'on feint de connaître le secret au lieu de feindre le secret lui-même. Un article anglais est le premier à présenter clairement Descoings comme gay, alors que le directeur de Sciences Po avait personnellement brouillé les pistes en se mariant, et en s'émouvant qu'on l'attaque en évoquant sa "prétendue homosexualité". La réponse qu'il a faite à cette attaque a été justement de ne rien dire... en renvoyant les adversaires à sa soi-disant homosexualité – "prétendue" donc par ses adversaires mais en même temps, en ne répondant pas, cette homosexualité ni validée, ni infirmée par lui finit par être tout aussi "prétendue" par lui.

Quand moi j'y voyais la confirmation de toutes les thèses de Lestrade, mes amis de café se sont émus du droit à la vie privée, bafoué par nos sales petites rumeurs. Evidemment, le torrent d'arguments qui s'ensuivit ne fut pas très propice à la clarté à la distinction... mais Descartes n'avait jamais prétendu faire de la philosophie dans les cafés. Ni sur des blogs. 

 

      comingout_lestrade.jpg

 

Coming out et exemplarité

 

La ligne centrale de mes attaques, outre la recherche de confirmation des thèses précédemment annoncées, est que Descoings n'a pas compris l'utilité se dire publiquement homosexuel avant de mourir. Lui le pédagogue révolutionnaire, futur ministre de l'éducation d'un second mandat Sarkozy, n'avait pas compris que le coming out avait un sens. A mes yeux, c'est la seule façon de montrer aux homophobes endormis en chacun de nous (les gays sont les premiers grands homophobes, du reste) qu'être gay n'est pas une maladie ou une honte. La qui commence avec l'exemplarité. Il faut relire le Gorgias de Platon, où Socrate reproche aux dignitaires athéniens, qui prétendent connaître la justice, de rendre leurs propres fils ou peuple malhonnêtes – les thèses machiavéliennes plus récentes naissent plutôt d'une critique des exigences de cette exemplarité et de la reconnaissance d'un pouvoir indépendant du langage, de l'image, et de la tromperie. Bref, au top de ma forme, j'aurais dû parler, entre deux cafés allongés de Platon ou de Machiavel et de l'antériorité logique aussi bien que chronologique de Platon sur Machiavel... 

Mais là où le bas blesse, c'est que Descoings ne pouvait pas ignorer l'utilité du coming out. Lui-même était qu'outé auprès de ses amis (de sa femme sans doute) et de ses collègues. Et s'il pouvait être outé et vivre dans un monde moderne, c'est parce que d'autres avant lui ont porté la responsabilité de cet outing. Pour ces deux raisons, Descoings vivait de la tradition d'outing avant lui. Et pourtant, tout en récoltant les fruits (personnels de bien-être, ou sociaux de reconnaissance), il n'a pas cru bon de s'outer. Pourquoi tout à coup clore la sphère publique à l'environnement de travail...? Quand tout le monde chante ses louanges, pourquoi ne pas justement saisir l'occasion de réellement aider ce qu'il appelle les "déviants" dont il fait partie (terme vague qui désignait autant les jeunes bacheliers venus des banlieue ou... tous les autres déviants) ? 

Sur la revue en ligne Minorités, Thévenin avait conclu son article par une remarque assez forte en disant finalement que ne pas se dire gay revenait à dire que son couple ne comptait pas, que son amour ne comptait pas. 

On peut trouver cet argument sentimental, et complètement cucul... mais les hommes politiques s'élisent avec femmes et enfants en second plan quand le photographe de Paris Match débarque. On ne se fait pas homme politique tant qu'on n'a étalé une partie de sa vie privée (les plus habiles savent seulement laquelle présenter).

 

 

Une transparence bienséante est-elle possible ?

 

La seule conclusion à laquelle j'ai pu parvenir, donc, est que les hommes politiques devraient faire preuve d'exemplarité. S'ils veulent le pouvoir, le minimum à exiger est là : qu'ils montrent patte blanche. De la même façon d'ailleurs qu'ils présentent des comptes de campagnes, une déclaration de patrimoine et un bilan de santé. Le concept de vie privée est tout de même sérieusement affaibli quand on exige pour être président de se dévoiler à ce point. Alors honnêtement, il n'est pas aberrant de demander que certains politiques fassent preuve de transparence. 

La vie privée n'est pas un concept stable ou définitivement acquis. Et si je comprends parfaitement qu'on préserve les enfants d'un certain nombres de réalités peu engageantes, en revanche, je ne vois pas vraiment de quoi on protège les adultes. Ce qu'on garde pour soi dépend des moments ou des usages qu'on veut en faire. Les débuts de la vie privée commencent au 19ème siècle quand on fait sortir les enfants de la chambre des parents, qu'on arrête de construire les chambres à l'enfilade dans les maisons, et qu'on invente ce truc formidable : les couloirs (dans lesquels se répandent les "bruits")... Si j'ai bon souvenir d'ailleurs, on a eu le droit à tous les détails de la vie de DSK, et surtout, on n'a pas vraiment fait les bégueules. On a trouvé ça à la fois distrayant (il faut le reconnaître, regarder la chambre à coucher des puissants est une occupation de valets qui a été cultivée depuis fort longtemps), mais aussi extrêmement légitime. Il est impossible de simplement dire que tout élément de la vie est privé jusqu'au moment où pour une raison juridique cette vie privée devienne publique. Car c'est justement le soupçon qu'on instille qui permet de faire éclater certaines affaires. Encore récemment, si on a su que Juan Carlos allait faire des safaris et poser à côté de carcasses d'éléphants qu'il avait personnellement abattus, c'est bien parce que certains sont passés au-dessus de cette prévention à l'égard de la vie privée. Attendre qu'une affaire n'explose que lorsqu'il y a faute, ou crime, c'est un joli rêve. Au sujet même de DSK, aucun crime n'a été pour l'instant attesté. Il n'est pas condamné pour viol. Aurait-on dû ne rien dire et ne rien savoir...? Il a littéralement été écarté de la vie politique sur un soupçon légitime !

En réalité, ce dont on s'émeut, c'est que dans ce qui relève de la vie privée intéressante (achat trouble d'appartements, abus de biens sociaux, conflits d'intérêts etc.), on range désormais la vie sexuelle ! Or, à moins d'être resté enfermé pendant vingt ans, on sait désormais que les enjeux de sexe, de genre ou de sexualité sont aussi des enjeux de pouvoir. Il est logique d'aller un peu plus loin que les affaires d'immobilier, ou d'amitié étrange (encore une fois, quand on a titillé Mélenchon et son amitié avec Dassault, qu'était-ce d'autre qu'une affaire de "vie privée" ?)

En bref, aucune transparence modérée et bienséante ne me semble possible. 

 

 

 

...et depuis... Christian Vanneste est toujours à l'ump ! (Lol ?)

 

Là où devrait vraiment se situer le débat.

 

Mais l'un des points qui a le plus exaspéré une amie freakosophe est la hargne dont j'ai pu faire preuve à l'égard des gays planqués de droite. 

En effet, après d'autres débats avec un ami journaliste et gay, celui-ci m'a fait remarquer que les hommes politiques de gauche n'avaient pas fait beaucoup mieux. Le seul député (j'insiste : député) outé à l'heure actuelle est justement un homme politique de droite : Frank Riester. Malgré sa plutôt belle gueule et ses cheveux blancs à la Warhol, je reste persuadé qu'il ne s'est outé que par accident. Il a en effet décidé de s'outer en réponse à un militant de gauche qui se moquait de son homosexualité. Comme Karouchi, ou Delanoë... au moment des élections, donc, ils ont fait leurs confessions (j'attends avec impatience le moment où le bureau des jeunes pop en feront de même...). Alors soit, les hommes politiques de gauche ne sont pas réellement gayfriendly ou clairs sur l'homosexualité dès qu'il s'agit du pouvoir. Mais c'est historiquement à gauche que le combat a commencé, et ils sont idéologiquement obligés à accepter ce changement, à moins de ne plus être de gauche. Contre un homme de gauche hypocrite, vous avez toujours la possibilité de faire pression, contre un homme de droite décomplexé, vous n'avez aucun levier (et c'est aussi pour ça que je trouve con d'aimer les mecs de droite décomplexée contre les mecs de gauche hypocrite).

Mais si les gays de droite m'agacent tout particulièrement, c'est qu'ils font semblant de ne pas percevoir la contradiction entre leurs idées et leur mode de vie. Alors qu'ils vivent comme de parfait cadre A +, qu'ils s'offrent toutes les fringues que peuvent contenir les boutiques du Marais et qu'ils se planquent dans leurs apparts du 15ème pour rester à l'écart des coins de drague où ils vont ramasser les petits jeunes de la banlieue d'à côté, ils font comme si cette consommation de mode de vie gay était due à leur parfaite intégration, au lieu de comprendre qu'elle a été arrachée par des années de militantisme avant eux. La réponse synthétique que Lestrade leur fait est simple : "Learn your history, idiotes !" 

Les gays de Gaylib (la branche UMP) ont par exemple tout fait pour soutenir Nicolas Sarkozy, pourtant hostile au mariage gay, incapable de virer Vanneste de son parti, et revenant sans conviction vers les valeurs patriarcales. Quelle genre de conscience politique est au travail ici ? Aussi fine qu'une capote sensibilité extrême, si vous voulez mon avis. Mais dans mon infinie innocence, j'ai réussi à comprendre leurs arguments. Car il y a bien un dernier argument à jouer, et qui n'aboutit pas immédiatement à une auto-réfutation de la part des gays planqués de droite. Cette idée est que dire sa sexualité n'a plus d'importance. Autrement dit, la tradition du coming out n'a plus de sens. Le coming out n'est plus fondateur. Une tradition se perpétue parce qu'elle est utile, fondatrice d'un lien communautaire (à la question "existe-t-il une communauté gay ?", je crains devoir faire la même réponse que précédemment "learn your history, idiotes !"). Dans le monde d'avant 2012, cette tradition avait un sens, mais aujourd'hui résister en disant son homosexualité n'a plus de sens parce que tout le monde sait ce que c'est qu'être homo. Il n'y a plus d'insultes, plus de pouvoir oppresseur, le ciel s'est éclairé, les arc-en-ciel ont rayonné, et les poneys roses ont envahi les rayons de supermarchés.

Dans ce cas, le coming out n'est plus une arme du tout, et on peut commencer à s'intégrer à un parti conservateur pour réclamer comme les autres les bénéfices de la prochaine croissance. A leur façon, d'ailleurs, les restes d'homophobie, les gays de droite doivent penser pouvoir les combattre au cas par cas, de l'intérieur. Le paradigme d'une résistance de l'intérieur est d'ailleurs souvent mis en exergue pour justifier tout à coup qu'on puisse négliger la moitié de sa vie au bénéfice de l'acquisition d'un statut social nouveau. Être gay et participer au même réunion qu'un Christian Vanneste, c'est résister de l'intérieur ! Si les mecs étaient vraiment si décomplexés, ils devraient faire l'éloge de la compromission, et simplement se présenter comme des parvenus – je ne vois pas comment appeler ça autrement. 

Bref, pour l'instant, on ne peut pas dire qu'être gay soit une chose qui suscite l'indifférence, à moins d'avoir grandi dans des milieux sans Christian Vanneste et émancipés des Christine Boutin. Mais la meilleure raison est que le pronostic de Foucault a tout pour ne pas être faux : espérer que le monde soit un jour totalement ouvert à l'homosexualité est une douce folie. Les hommes n'ont jamais bien compris la servitude des femmes en ayant pourtant vécu plusieurs millénaires avec elles. Une minorité se fera difficilement majorité (ou sinon, demandez la formule dialectique d'un tel changement à M. Zemmour). Résister se fera donc, à mon humble avis, toujours en faisant son coming out. Le pouvoir changera sans doute de mains, et il est intéressant de simplement se demander quels seront les axes d'oppression de demain, mais à moins que quelque chose d'essentiel ne s'infiltre des gays jusqu'aux hétéros, les combats gardent toute leurs légitimité. 

Partager cet article
Repost0

commentaires

Présentation

  • : Gays and Geeks
  • : Le blog du mec avec qui vous aimeriez parler dans un café de tout et n'importe quoi – mais que vous hésiteriez à rappeler pour en boire un deuxième parce qu'il a quand même l'air flippant et immature. Bref, le blog d'un queutard romantique qui essaie de trouver la paix intérieure et le salut par la culture pop. D'intello qui lit encore Naruto. De fan de Kele Okereke qui n'arrive pas à aimer son dernier album.
  • Contact

Recherche

Liens