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29 juillet 2014 2 29 /07 /juillet /2014 11:23

 

ou que s'ils sont comme ça...      

Je dois commencer par décliner mon appartenance en terme de look (de tribu comme dirait Grindr). Je n’ai pas franchement le corps d’un Musclor gay. J’ai un look et une gueule passe-partout – pas parce que je suis petit et que je cours dans les forts (j’entends quelques potes sarcastiques penser « quoique… »). Plus jeune, j’écrivais que j’avais un look d’étudiant, ce qui voulait simplement dire que je ne portait pas de costume et que j’avais moins de 30ans. Sans aucune qualité définitoire plus précise. Cet état quantique du look, qui cumule incertitude physique (ni gros ni mince etc., ni blonde ni brun…) et incertitude vestimentaire (ni gamin ni adulte, ni trop décontracté ni trop guindé) m’a sans doute assuré de pouvoir passer dans différents milieux ou plaire à différentes genres de mecs sans trop d’embarras.

En d’autres termes, cela m’a valu un jour le compliment de n’être pas trop « marqué » pour un pédé, ce que j’ai pris avec un sourire gêné, sans grand drame, en essayant de montrer par le plus de blagues et de pédagogie possibles que c’était très blessant en fait – et en me disant que je venais d’avoir là une bonne matière première pour mon grand livre futur sur l’éducation des hétérosexuels.

 

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Les clones gays des années 70, ancêtre commun des bears et des mecs musclés.

Mais tout ça, c’est moi et ma complexion singulière, d’hormones et d’idées folles. J’ai une raison plus facile à justifier. 

Les mecs musclés ont un défaut assez marqué, ils ne peuvent qu’aimer à la fin d’autres mecs musclés. Ils sont comme ces gens beaux qui n’aiment que d’autres gens beaux. Et ils finissent par construire une sorte d’aristocratie gay super select, qui exalte la masculinité de salle de sport. Si bien que pour entrer dans certains endroits leur corps et l’investissement d’argent et d’efforts qu’il représente deviennent la seule véritable carte de visite. 

Ils ont un raisonnement assez simple. S’ils ont choisi d’être musclé ce n’est pas par une sorte de passion naïve, ils l’ont choisi parce que c’est bon en soi. C’est une raison quasi-médicale qui les motive. Être sain ne peut que signifier être sain selon les critères partagés par d’autres. Si vous dites que, pour vous, être sain c’est geeker toute la journée en matant des séries et en envoyant des snaptchats à vos potes, on vous prend simplement pour un mec trop idiot pour comprendre la signification même de ce qu’est être en bonne santé. La santé ce n’est pas relatif, sinon ça vaut pas le coup. A ça, j’ajoute que l’engouement des pédés pour la muscu a eu aussi cette raison historique de masquer les effets de la trithérapie chez les séropositifs. Quand je dis que c’est une question de santé, c’est très concret. C’est une revanche contre la maladie et le traitement qui détruit les corps, et modifie irrémédiablement les silhouettes.

 

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Google me dit que cette image s'appelle du sporno.

La communauté bear est tellement plus sympa en comparaison. Les types sont décontractés parce que tout le monde sait qu’on n’est pas là pour juger la perfection des corps. La théorie d’un pote est d’ailleurs de dire que cette décontraction et cette graisse est comme un backlash des images traumatisantes des patients agonisants du sida. J’ai grandi avec ces images de mecs super maigres, et c’est vrai qu’elles m’ont marquées.

Mais la coolitude bear va plus loin. L’appli Growlr en donne une petite idée. Les discussions peuvent être internationales. Vous vous couchez tard, et vous parlez avec un super daddy qui se réveille à Washington avant d’aller à son taff. Vous parlez de la scène punk avec un mec d’Oakland. Vous parlez avec un Français mélancolique à Chicago, avec un pédé au placard à Dubaï…. Ok, vous vous dites que Facebook fait pareil. Mais sur Growlr, c’est plus simple (il suffit de faire grrrr ou woof), les photos de cul sont monnaie courante (les mecs aiment juste se montrer), le ton est plus cool, sans cette impression d’avoir troublé l’intimité facebookale de quelqu’un d’autre. Et les tags line sont vraiment drôles :

« No twink were harmed during the process »

« making you a star »

« fur, glorious fur »

« so simple, even a straight man could do it ».

 

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Seth Rogen, icône malgré lui des bears.

 

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Seth Rogen et son pote gay, James Franco.

Forcément leur bromance excite l'imaginaire gay.

 

Ultime argument, beaucoup plus de mecs sourient sur Growlr, A l’inverse de Scruff où tout le monde adopte le mono-look mâchoire serrée + froncement de sourcils, comme si la planète des pédés à smartphone avait été constipé d’un coup et n’avait trouvé comme solution que de faire un selfie d’eux au moment d’aller aux chiottes.

Alors je sens venir un vent de contestation. Il y a des mecs qui sont musclés pour eux-mêmes, uniquement pour eux-mêmes et qui préfèrent même les mecs gros ou les crevettes. Il y en a même sur bearwww. Mais d’abord, je remarque qu’il s’agit souvent de plans cul, qui restent au stade de pulsions contraires passagères. Et je rétorque à ça que si jamais ils aimaient vraiment les mecs différents d’eux, ils seraient les véritables héros de ce post, ceux qui ont tout pour marquer une distinction et finalement la refuse au nom de l’amour ! A vrai dire, j’en connais un comme ça, dont je suis toujours à deux doigts de tomber amoureux. Je bande pour sa freakyness. Il assume parfaitement de n’aimer que les mecs au caleçon un peu distendu alors qu’il est affûté comme un sportif. Dommage qu’il soit marié et qu’il ne cherche que des plans – that’s my fucking province, bro !

 

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16 mai 2014 5 16 /05 /mai /2014 00:38

 

Pour lire ce post : jouez cette vidéo de hurlements de loups en même temps que vous écoutez You&Me de l'album de Damon Albarn... super bootleg garanti.

 

Le hurlement du loup est l’un des trucs les plus beaux que je connaisse. Entre l’orgasme et la plainte. Poussé du haut de la colline, il résonne à travers un espace précis, il est géolocalisé, territoralisé. Et il rassemble tous les loups autour. Comme une appli mobile en fait, comme grindr, growlr, scruff, blendr… Mais derrière ce long glissendo, plus qu’un désir de sociabilité, il y a aussi une tristesse, celle de son actuel isolement. Son empressement mêlé à la frustration se transforme presque en hargne. Si l’on ajoute une pointe de glande devant la télé et le macbook en synchro, ce sentiment est aussi le mien. Mes passages sur les sites procureraient – à qui pourraient m’épier par webcams interposées – la même sensation que les hurlements élégiaques et rauques du loup. 

Je feuillette les profils, les soirs d’enthousiasme, je fais des compliments gratuits aux mecs les plus éloignés. Et parfois, je ponds un long message pour tenter de les convaincre de sortir de la capitale pour traîner dans ma province. Dans ces cas-là, je hurle à la mort. On me répond quelques « salut » en retour, on ne développe pas. Moi non plus. J’ai été entendu, c’est tout ce qui compte.

 

 

 

Ma condition est celle de tous les pédés de province : je connais une irrémédiable et perpétuelle disette sexuelle. Je ne dis famine, car la famine entraîne la mort. Et moi, comme ces petites créatures du désert, je m’en sors bien. La sélection sexuelle a conditionné chez moi un mental d’acier, un mental de survivant. Je grignote quelques scorpions et je m’hydrate en machouillant les seules feuilles qui éclosent au milieu des tempêtes de sable. Je suis une sale bête robuste. C’est ce qui me rend si terrifiant pour mes amis de Paris, comme pour mes amis de villes de plus de 50 000 habitants. J’arrive, je drague leurs potes, je drague des boxeurs rebeu bi en manque de câlins dans une cave, je baise sans scrupules des jeunes mecs qui veulent baiser dans les escaliers. C’est n’importe quoi. Un vrai fennec.

 

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L’écosystème sexuel hyperburbain est si abondant qu’il est pour moi, le pédé de province, une source de rêveries érotiques sans fin. Dans chaque aire de géolocalisation, je vois un gigantesque terrain de jeu. Les daddys, les geeks, les racailles, les trentenaires câlins… il y a de tout. En plus, dans ces villes, bien plus qu’ailleurs, la population gay se renouvelle. Les centres urbains attirent plus de mecs, de touristes d’étudiants. Chez moi, pas d’université, de touristes gays, ni d’emploi. Mon angoisse en arrivant dans ma petite ville était que tous les pédés finissent par se connaître, par baiser en vase clos, et par partager leurs petits secrets et les rumeurs les plus glauques – une ambiance de centre de dépistage un samedi matin (quand tout le monde émerge de sa gueule de bois, après avoir fait les pires conneries la veille, et ne peut pas s’empêcher de scanner à travers sa propre culpabilité les raisons de la présence des autres). C’est l’inverse qui s’est produit, tout le monde est courtois, engourdi – parce que plus personne ne baise. 

Il m’a été donné de faire l’une des rencontres les plus étranges de ma vie. Un mec m’accoste très directement sur gayroméo, une bombasse. Sur le profil, tout est super réglo. Le mec donne la date de ses tests, explique qu’il est cultivé, qu’il aime toutes les positions, qu’il faut parler au lit pendant la baise et qu’il est bien foutu parce que simplement c’est un fait et qu’il le sait. Il dit aussi qu’il est escort… Je réponds donc très sagement que je n’ai pas une thune. Mais cette soirée-là, exceptionnellement, il offre sa tournée. Parce qu’il se casse de cette ville de province pourrie. Il est là depuis plusieurs mois et il ne peut pas rester : personne ne veut baiser. Il est obligé de repartir dans le Sud, parce qu’il devient pauvre à force de rester ici. 

 

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Mes conversations avec mes potes de Paris butent invariablement sur ce problème. Pour eux, je n’ai pas le droit de me plaindre a priori. Nos problèmes de coeur ou de sexes ne sont pas conditionnés par l’endroit qu’on habite. Ils pensent que c’est dur de draguer à Paris comme ce serait dur de draguer n’importe où, parce que draguer c’est d’abord une question d’attitude, un travail sur soi, une timidité à affronter. Certes. En plus, ils m’expliquent que les mecs de Paris, du fait de la concurrence, deviennent tous incroyablement artificiels, exigeants et hypocrites (j’ai mis au hasard trois adjectifs péjoratifs, parce que je ne suis pas très sûr de l’impact psychologique de cette concurrence sur les cerveaux pédés). Mais très vite, je ne peux pas m’en empêcher – je me sens obligé – d’expliquer que ce n’est rien comparé à la simple absence de possibilité de rencontres. Une fois que j’aurai rencontré quelqu’un, j’aurai les mêmes problèmes qu’eux. Pour l’instant, je reste bloqué à l’étape antécédente : rencontrer quelqu’un.

Voilà le chiffre qui me hante maintenant. Grâce à Gayroméo, j’ai calculé la densité de la population gay dans ma ville – gayroméo est un des seuls sites à fournir ces chiffres (avis aux sociologues). Environ 80 connectés. La ville de Paris, à laquelle je n’ajoute pas le futur Grand Paris, compte 20 000 connectés (le résultat double presque si vous ajoutez la banlieue). Par conséquent, n’importe qui à Paris a 250 fois plus de chances que moi de rencontrer un pédé dans la rue. C’est assez vertigineux. Aux hétéros qui liraient ce poste par hasard : ça revient à draguer dans une caserne – ou pour les filles, draguer parmi une troupe de ballet classique. Je suis comme un pauvre qui souffre de faim devant des gosses joufflues qui se plaignent de n’avoir plus leur paquet de céréales préférés (vous savez celles où y’a le chocolat noisette dans des petits berlingots). Je dis ça, je ne veux pas clasher mes potes inutilement. Je les adore. Et il tolèrent avec tellement d’amour que je sorte draguer des mecs quand je leur rend visite, que je les aime encore plus. 

La seule chose qui me chagrine est d’être le seul à vivre avec cette vérité en tête : que nos histoires de cul ou d’amour sont véritablement conditionnées par un milieu, une offre relatif un espace. Grindr et les sites gays ont toujours eu ce génie de nous mettre en face de cette réalité spatiale du désir. Tous les pédés le savent. Et de ce que je lis, depuis l’âge du sida, on le sait : les pédés voyagent là où ça drague, ils savent retrouver la trace des coins de drague. Ce réseau de coins de drague est peut-être matériellement menacé par Grindr, puisque chacun n’a plus qu’à allumer son portable au lieu de se perdre dans les allées sombres d’un parc coupe-gorge (mon dieu, dans les années 70, j’aurais été le roi de la drague en plein air, meilleur qu’Al Pacino dans Cruising). Mais géographiquement parlant la réalité est toujours la même : les centres urbains concentrent toute la population pédé.

 

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Le seul mec qui m’ait vraiment compris est un Américain qui était de passage en France. En accompagnant sa copine à un mariage, il est soudain entré dans mon aire de géolocalisation Grindr. On a tout de suite sympathisé. De pédé cul terreux à pédé cul terreux, on s’est compris. Il vient d’une ville du Vermont, qui s’appelle Montpelier (8000 habitants). Et longtemps après baisé dans les chiottes du dernier café avant la fin du monde, on a gardé contact pour se parler de la façon dont on vivait nos sexualités de fennec paumé dans le désert. On se racontait comment on avait fait quelques centaines de kilomètres pour aller baiser. Comment on était tenté de baiser de façon de plus en plus hard avec des bisexuels de passage. Comment on passait l’hiver à hiberner en se masturbant trois fois par jour. Une vraie relation extraspatiale cette fois.

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22 février 2014 6 22 /02 /février /2014 15:23

 

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Supposons si vous le voulez bien que nous ne soyons pas dans une émission de Frédéric Taddéï, et qu'on puisse vraiment tout dire, sans se faire prendre à parti par le plus extrémistes autour de la table, et sans avoir à radicaliser notre thèse en retour (ou la renier). Bref, on va s'imaginer être entre nous, par une fin de soirée d'hiver, ivres de bouffes et d'alcool, et on va parler innocemment de toutes les rumeurs horribles qu'on entend. Ce qu'avec un peu d'éducation on appelle parfois la comédie humaine.

La rumeur est le système limbique de la communauté gay. Se reconnaître entre pédés, noter les indices, ou deviner sauvagement qui en est n'est jamais une science exacte ; c'est un pur besoin, un instinct de survie. Le monde gay bruisse par conséquent de rumeurs, de paroles subterfuges, d'histoires interlopes qui sont comme autant d'indices qu'untel en serait ou non. Non seulement ces signes sont ambigus, mais en plus, ils ne peuvent être transmis publiquement comme des informations ordinaires. Double régime de rumeurs donc.

Il y a, pour cette raison, dans la communauté gay une sorte de tradition qui relève du rituel initiatique, et qui consiste à deviner qui est gay et qui ne l'est pas. Non seulement lire les signes, mais aussi dévoiler l'identité réel de celui qui est scanné. 

Forgé dans le vocabulaire technicisant de notre monde moderne, cette faculté a pris le nom de "gaydar". Mais en réalité, c'est beaucoup plus proche de la performance magique d'un shaman. Car concrètement, aucun gaydar n'est infaillible. Un psychologue qui a encore voulu bosser sur un sujet de thèse superficiel, facile et rentable a voulu en comprendre le mécanisme, et... nada. On déclare qu'une personne est gay, sans qu'on ait beaucoup de signes – une simple intuition inspirée par un regard, tout au plus. Mais même si le gaydar s'avérait une science exacte, son intérêt serait nul. Car les vrais cas passionnant, ce sont ceux où les signes sont apparemment contraires. Le travail du shaman gay consiste à redécrire si bien chacun de ces gestes qu'on croit véritablement avoir fait apparaître une deuxième réalité. 

 

 

Ma performance shamanique la plus récente a été de deviner qu'un candidat de relooking extreme était gay. On regardait ça paresseusement avec un pote sur mon canapé, et j'ai dit, simplement "ce mec est gay". Il a suffi de regarder de plus près et mon sort a pris aussitôt effet. Chaque accolade qu'il faisait à Chris Powel (le coach animateur super bogosse) semblait être un peu trop longue, un peu trop savouré. Puis toutes ses déclarations semblait suspicieuse : le mec était vierge, exprimait un peu trop fort son désir d'être marié et normal, et surtout il mangeait visiblement pour fuir tous ses problèmes. Tout ça suivi plus tard de l'aveu de son propre viol. Bon, c'est une émission où on ouvre les tripes d'un mec pour lui dire que maintenant qu'il s'est mis à poil tout ira mieux. Du traumatisme public (le mec se fait insulter par un SDF au moment où il fait un exercice dans la rue) pour guérir un traumatisme privé. Ces émissions servent à tester son propre talent de pisteur de secret. Elles ont cette utilité ethnographique : s'habituer et affiner nos talents sociaux avec des histoires de traumatismes à dévoiler.

Passées les sept émissions de Secret Story, vous pouvez être rodé au pistage de secrets, mais pas encore à l'effet du dévoilement de ce secret. Le drame qui entoure la déclaration public du secret, c'est la drogue du mec qui outte et qui balance sur les autres. Un autre pote m'avait expliqué comment un jour, il était tombé sur le fils d'un mec célèbre dans le milieu du showbiz français (un bon thème de comédie humaine, hein), et très vite, ce mec se confie, en racontant – et là vous allez sentir comment on peut prendre en otage quelqu'un simplement par un secret – qu'il a été adopté uniquement pour se faire violer par son beau-père et ses amis. 

Celui qui raconte cette histoire met aussitôt ses auditeurs en difficulté car ne pas y croire c'est faire preuve d'une insensibilité qui virerait presque à l'agression. La révélation du secret appelle une telle empathie qu'on a l'impression qu'on nous extorque notre confiance. Mais si ce récit est vrai, il est horrible deux fois : par son contenu et par le silence coupable qui l'entoure. Ces confessions n'ont donc pas qu'un effet local sur nos croyances (par exemple en ce qui concerne cette célébrité en question), mais elles nous présentent une autre version du monde : un monde où un homme puissant peut s'acheter des enfants pour les violer. Les bons mythos perçoivent tout de suite le potentiel renversant de leurs mensonges. Et ils nous tiennent avec ça. La seule porte de sortie est de croire qu'on est tout simplement incapables de savoir quoi que ce soit.

 

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Entre la révélation fracassante et le simple outting, il peut y avoir un monde. Mais il y a aussi toute une partie de la découverte de l'homosexualité qui est si importante qu'elle refaçonne notre monde. Ce moment est crucial dans l'évolution d'une jeune pédé. A l'époque, c'était l'histoire de Bruno Masure (l'ancien présentateur de France 2) bourré dans les chiottes du queen qui aurait à moitié sauté sur un jeune mec, qui m'avait presque traumatisé – parce que Masure était très propre sur lui, un peu pince-sans-rire. Depuis, j'ai toujours en tête une liste de mecs gays célèbres dans plein de domaines, qui ancrent solidement dans mon esprit l'idée que j'ai une légitimité à exister dans ce bas-monde. Ils forment littéralement mon totem, mes ancêtres illustres que je peux convoquer pour devenir super bitchy. 

Mais il y a des échecs qui font un peu réfléchir. Certains de mes potes soupçonnaient depuis le début Steve McQueen d'être gay : le mec fait des films trop cul, trop direct, trop torturé. Et il fout toujours Michael Fassbinder à poil. Bref, une folle honteuse de plus, de notre camp, mais comme plein d’artistes dans le monde du cinéma, super au placard. 

Mon ancien prof de français gay qui me drague une fois de temps en temps a plaisanté en racontant que Huysmans était gay. Je me suis aussitôt dit que c'était cool qu'un super écrivain de plus rejoigne la bande et marche avec nous "on the wild side". Puis, une vérification internet plus loin, j'ai déchanté. C'est en fait le pote de Huysmans, Jean Lorrain, qui était un gay déclaré. Huysmans a simplement été vanné par tout le monde parce qu'il avait avoué qu'il avait un ami sodomite. Ce qui est plutôt cool et courageux de sa part. Les deux s'écrivait des longues lettres sur l'inutilité et la vacuité du désir, mais finalement si Huysmans était paumé, Lorrain lui avait l'air de bien s'amuser... Bref, la rumeur au départ flatteuse à mes oreilles avait un fondement tout à fait diffamatoire à l'égard de Huysmans. Dans ce même blog, j'avais raconté comment on a taxé le catcheur black Quinton Rampage de gay parce qu'il était simplement un peu marrant. Dans ce cadre encore, la révélation de l'homosexualité est ambiguë, elle me ravit, moi, mais elle a un fumet parfois un peu nauséabond. Je ne connais pas les circonstances qui ont poussé à soudain révéler que Gandhi ou Malcolm X était bi/gay, mais elles pourraient elles aussi n'être finalement que des diffamations retournées en lauriers LGBT.

Au milieu de ce pétage de canalisation jaillissante de merde qu'a été l'affaire Dieudonnée – avec règlement de compte entre Soral, LePen, Nabe, Jour de colère etc. pour savoir qui est le vrai facho – beaucoup de potes gays m'ont confié que beaucoup de fachos d'extrême droite étaient purement et simplement des folles honteuses. J'aimerais citer les noms, mais je me retiens. Toute une part de la culture skin, facho et néo-nazi est effectivement en lien avec le processus de légitimation de l'homosexualité au cours du XXème siècle. Et quand ces potes m'ont dit ça, on y a vu une occasion de formuler pour nous une image du monde, à partir du secret qu'on détient. Un secret où la répression des pulsions rendrait spontanément facho. Bien sûr, on conclut tous en souhaitant plus de transparence.

Je nous caricature un peu mais l'essentiel est que notre pouvoir de dévoilement de l'identité sexuelle n'est pas complètement destiné qu'à nous-mêmes. On n'est pas en train de se congratuler en permanence de faire partie de la même côterie. Je crois que comme tous les shamans, on se donne un rôle social. Notre excentricité (au sens propre) est utile à la société pour obliger à envisager une autre dimension à laquelle elle n'a pas accès. Tous ces outings qu'on fournit, vrais ou faux, ont cette destination finalement : c'est par eux qu'on se rattache au cours normal de la vie hétéro, car on connaît les coulisses de l'hétérosexualité mieux que les hétéros eux-mêmes. Notre monde n'est que l'envers du leur. Et comme les morts reviennent une fois de temps en temps hanter les vivants, il est normal que les gays hantent les hétéros. L'outing est un rituel par lequel la société retrouve son unité. 

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13 août 2013 2 13 /08 /août /2013 00:36

 

Ça y est, c'est arrivé.

Pour la première fois de ma vie, pour draguer un mec j'ai dû parler sérieusement de ma conception de la fidélité. Pour être honnête, on avait déjà largement consommé la partie sexuelle de la relation. Mais là, c'est sorti de nulle part, fin et affûté comme un quizz de l'été :

"c'est quoi la fidélité pour toi ?"

Et honnêtement, je m'en suis bien sorti. J'ai envoyé un sms à mon ex pour dire "wow, regarde ! Je progresse chaque jour sur le long chemin de la maturité, je deviens un homme meilleur ! (ressors avec moi...)" Je communique moins facilement sur les kilos que je prends en bouffant des glaces, hé. Être exhibitionniste est une chose, être utile c'est encore mieux. Imaginez un mec qui se fout à poil devant vous, mais qui vous tend un stylo BIC quatre couleurs à la place de sa bite. C'est super utile, non ? Ce post, c'est la même chose. Je veux faire profiter les plus galériens de mes précieuses antisèches. En quelques SMS, j'ai réussi à défendre le couple libre. C'est une sorte de partie d'échecs mentale et psychologique. C'est mon coup du berger : au moins pratique pour immobiliser la conversation sur la fidélité pendant quelques mois avant de vous rendre compte que ce mec n'était pas pour vous.

 

SMS This-guys-should-get-an-award

 

Donc votre prétendant à une relation sérieuse attaque. Comme dans un film de kung fu, il faut embrasser le mouvement de son adversaire pour le guider. 

D'abord, une petite précaution, redéfinir les termes : "je préfère parler de confiance" (plutôt que de fidélité). 

C'est au fond le moment le plus important. Quoi que vous disiez après ça, il vous reste au moins la porte de sortie de dire que vous ne parliez pas de fidélité mais de confiance...!

Mais, je ne m'en suis pas tenu là. Jouer défensif, c'est une chose. La vraie défense c'est l'attaque. J'ai voulu extrapoler (je ne sais pas pourquoi mais j'ai eu une vague réminiscence brassenssienne de "mourir pour des idées d'accord, mais de mort lente" – chanson que j'ai toujours trouvée conne...). 

"Mais j'admets, on peut être fidèle... mais à des idées, parce que les idées ne vieillissent pas, contrairement aux gens et aux gays qui détestent ça."

Là j'ai pris la confiance. J'ai développé mon petit truc des gens qui changent. Mon Qi avait complètement épousé le postulat de départ et se trouvait prêt à exploser dans un unique coup de poing du dragon conceptuel.

"Au fond, être fidèle c'est être confiant que l'autre nous accompagnera dans un projet. Par exemple, à un certain moment, tu vois, être fidèle c'est vivre ensemble dans le même appartement, à un autre, c'est tout se dire, à un autre encore, c'est savoir laisser à l'autre de la distance...

Le mec s'attendait à des principes rigides, du type "tu ne tromperas jamais ton mari", mais je prends le contre-pied. Puisque la confiance oblige à adopter les contours mouvants de la vie de l'autre, il n'y a pas de principes stables. Le ying passe dans le putain de Yang. C'est le Tao, Baby. C'est le moment où vous pouvez proposer un plan à trois ou une pause sexuelle d'une semaine où chacun fait ce qu'il veut tant qu'il utilise la capote.

 

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Evidemment, mon interlocuteur veut du concret : pas de trahison, pas de restau avec un autre quand ça devait être avec lui... bref, il demande une concession, et je lui accorde volontiers. 

"moi non plus je n'aimerais pas trop que mon mec me plante pour passer un moment avec un autre. Mais dans le fond, ça veut juste dire qu'il y a des priorités, et qu'à certain moment, le couple est une priorité sur le reste." 

Appréciez la nuance : le couple est la priorité, pas l'autre en soi. Alors là, c'est le finish. Pour être bon en tai-chi, il faut savoir n'être rien, mais ça ne coûte pas grand chose de faire aussi sentir à l'autre qu'il est un pur néant. Prônez l'indépendance, et dites que deux être indépendants valent mieux qu'un couple interdépendant.

"Mais tant que je ne suis pas jaloux, l'autre fait ce qu'il veut, et il ne peux pas me demander d'être une priorité en soi. L'indépendance et l'autonomie c'est le vrai truc sexy. Je n'aime pas la dépendance, la mienne ou celle de l'autre (et je n'aime pas être jaloux). Ceci dit, je n'aime pas non plus l'ingratitude, la trahison ou le délaissement. La fidélité ça peut se résumer à éviter ces trois tares". 

Comme Nicholas Cage qui balance une dernière vanne ou ses cheveux en arrière après avoir buter un mec, vous avez le droit à un bonus qui ne veut rien dire, un geste de pure élégance. Finalement, la fidélité c'est un truc tout bête, qui se résume à éviter d'être salopard, alors n'en faisons pas tout un plat.

Deux mois plus tard, c'était fini avec ce mec. Au moins, je suis resté classe. Bon gars, comme Nicholas.

 

 

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26 décembre 2012 3 26 /12 /décembre /2012 14:49

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Parmi les arguments contre le mariage gay, il y a des monstres rhétoriques si énormes qu'ils accusent automatiquement ceux qui les profèrent. En effet le problème pour une majeure partie de ceux qui luttent contre le mariage gay est tout simplement l'homosexualité elle-même. Il suffit de se rappeler que la dépénalisation de l'homosexualité a tout juste trente ans, et que certains hommes politiques de droite, comme François Fillon ont voté contre à trois reprises à cette époque-là. Pour le dire simplement, ces hommes politiques souhaitaient voir les gay ou lesbiennes derrière les barreaux, ou dans les cliniques psychiatriques, et que je sache, aucun ne s'est exprimé publiquement pour exprimer un quelconque regret. Il suffit de tendre l'oreille pour entendre dans ces prétendus arguments une pure et simple insulte, du même genre de celles qui pouvaient être proférés il y a trente ans. Ces idées participent de tout sauf du débat "républicain" (si on remplace homosexuel par juif, noir ou arabe, on entend la ritournelle). De façon générale, quand quelqu'un est accusé de nuire au genre humain, on sent que le point Godwin vient d'être multiplié par dix et qu'il est élevé au carré chaque fois que le propos est inséré dans un débat et présenté comme légitime (un débat s'arrête quand on tient des propos sexiste, racistes ou antisémites, non ?). La variante actuelle consiste simplement à mettre "mariage" devant "homosexuel" pour faire passer l'insulte :

- l'homosexualité mettrait fin à l'humanité et le mariage gay serait nuisible à l'intérêt général (C. Fucking Vanneste, qui ne s'est jamais fait exclure de l'UMP quoiqu'en dise le parti).

- variante : "l'homosexualité a provoqué la chute de Rome". C'est la contre-attaque officielle de l'Eglise qui appelle à mieux connaître son histoire, qui trouve un lien direct entre les moeurs folles de Néron avec la chute de l'empire Romain... Je n'aurai pas proposé mieux, sauf éventuellement le lien évident qui existe entre la moustache d'Hitler et son annexion des Sudètes. Le plus drôle est que si Constant et Constantin ont justement interdit les pseudo-mariage gay en 390, Rome s'est effondrée juste après, en 476 (et pas avant !). Là encore, le lien est évident, non ?

- "l'humanité est structurée entre hommes et femmes" (Lionel Jospin). Ceci est la version soft de toutes les conneries proférées ci-dessus, car il y a le mot "structure" dedans. La réponse sanglante de Virginie Despentes est exemplaire : on peut être un homme et sucer une queue et... rester humain ! c'est fou, non ? On se demande en quoi la différence homme/femme rend caduque l'homosexualité. Que je sache, un homo n'aime pas indistinctement les hommes et les femmes, mais bien l'un ou l'autre – lui aussi tient compte de cette différence ! Ou bien, dans la même catégorie on pourrait dire qu'elle rend également caduques les équipes de foot et les conseils d'administration des grands groupes du CAC 40...?

 

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- "On naît tous d'un homme et d'une femme" (Manif pour tous). Personne ne conteste ce fait biologique. Qui pourrait penser une seconde le contraire ? Mais ce fait ne gouverne pas la formation des familles, qui se composent, se décomposent et se recomposent. Et heureusement adoptent parfois. Le rasoir humien (qui invite à ne pas confondre être et devoir être) trouve pleinement son utilité ici. La définition de la famille n'est pas un fait biologique, mais culturel. La définition de la famille dans cet argument est si réduite qu'elle exclut les couples qui adoptent, qui divorcent ou qui ne procréent pas – voire les orphelins... Le bon sens évitera de réduire l'hétérosexualité à cette caricature de ce que les amis de Frigide appelle la "famille père mère enfant, la famille PME !" (eheheh). Les hétéros aussi ont intérêt à se défendre contre l'image simpliste qu'on donner d'eux.

- variante nationaliste : on naît tous de parents hétérosexuels. Rappel : la nature s'en bat les couilles que vous soyez hétéro pour faire des enfants ou non. Les spermatozoïdes n'ont pas besoin d'être hétéro pour féconder un ovule hétéro. D'aucuns affirment même que la bisexualité est une stratégie évolutive favorable à la reproduction et à la séduction (les mâles seraient alors plus compréhensif envers les femelles en se faisant mettre une fois de temps en temps). Ce qui est plutôt universellement observable est que quelque chaotique et catastrophique que soit votre vie sentimentale ou sexuelle, vous pouvez avoir des enfants. Vous n'avez même pas besoin d'être un bon parent. Et l'humanité a toujours vécu comme ça : en intégrant coûte que coûte à la grande ronde hétérosexuelle ses membres les moins éminents.

- petite place pour Zemmour (et Boutin, Xavier Bongibault ou Charles de Consigny) : l'homosexualité doit rester cachée, hypocrite. On est plus gay quand on est planqué déclare Xavier Fucking Bongibault et son mouvement "+ gay sans mariage" (qui n'est qu'une antenne tokéniste du mouvement chrétien contre le mariage gay). Cet argument est à la fois prescriptif et descriptif : il dit qu'il faut faire quelque chose, et en même temps que vous le faites. C'est dire, s'il est bordélique. Alors dans tous les cas, il suffit de rappeler que beaucoup de gays prennent le risque de vivre sans tenir compte de l'avis du chroniqueur et de ses potes néoconservateurs. Beaucoup de gays décident de vivre publiquement leur homosexualité, et semblent mieux vivre. En tout cas, c'est ce qu'ils disent, et c'est leur avis dont il faut tenir compte. Autrement dit, un homme, hétérosexuel, blanc, ayant grandi à une certaine époque dans un certain quartier populaire (laissons lui ça) vieillissant, auto-proclamé pourfendeur de la très ad hoc bien pensance, n'a aucune légitimité pour être prescripteur de normes en matière de sexualité. Qu'il s'occupe de faire jouir sa femme, et le monde s'en portera mieux.

 

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- variante "gay refoulé" : l'homosexualité doit rester subversive et cachée (argument Lifshitz) car "la marginalité rend libre". Même réponse qu'aux néo-conservateurs. Ce n'est plus ce que pensent une grande partie des homosexuels. La subversion a été l'atout des gays pour justifier leur intégration dans les mouvements révolutionnaires. La marginalisation de l'homosexualité ne lui est pas consubstantielle, elle relève plutôt d'une stratégie politique. La marche spontanée des minorités a donc repris une fois que le contexte politique a changé : comme les minorités ethniques, ou les femmes, les gays peuvent demander la normalisation et la reconnaissance auprès du reste de la société.

 

Une série d'arguments concernent la souffrance psychologique des enfants de couples homo, plus sujets que les autres aux "pertes de repères" ou à la discrimination :

- "des études affirment que les enfants souffrent d'être des enfants d'un couple homosexuel." Il y a tellement d'études qui disent que tout va bien et depuis si longtemps que dire le contraire, c'est tout simplement mentir. http://ilga.org/ilga/fr/article/722 Sinon, les mecs, faites votre étude.

- variante auto-réfutative (argument employé dans Glee) : les enfants d'homo souffriront d'une forme de discrimination (celui qui emploie ce type d'arguments ne veut justement pas reconnaître la légitimité du couple élevant ces enfants et entretient donc largement la discrimination qu'il prétend déplorer). C'est comme regretter que quelqu'un souffre de la honte qu'on va lui faire subir. C'est comme engueuler ses gosses parce qu'ils ont peur d'être engueulés. C'est comme se promener en plein milieu d'une fête raté en disant bien fort à tout le monde qu'elle est ratée... bref, c'est con. Si les opposants au mariage gay ne veulent plus que les enfants souffrent, ils n'ont qu'à ne plus y être opposés, ne plus considérer ces enfants comme des monstres, et tout simplement la fermer.

Là encore, le vrai sujet du débat (qu'admettent les plus honnêtes des anti-mariages) est au fond le divorce – qui concerne objectivement plus d'enfants et produit sans doute plus de souffrance. Ceux qui s'attaquent au mariage gay sont au fond aussi et surtout contre la désacralisation du mariage qu'avait amorcé bien avant l'accès plus simple au divorce. Le plus drôle est que ses opposants sont souvent eux-mêmes divorcés et profitent largement du "délitement des valeurs" : tels Jospin ou Sarkozy... Addendum : Quand de nombreux conservateurs déplorent l'idéologie de l'enfant-roi accusée de conduire la société dans une régression généralisée, on se surprend de les voir soudain si scrupuleux des droits et des souffrances des enfants. 

 

Enfin, il y a les arguments de ceux qui veulent faire croire que le véritable mal subi n'est pas la discrimination des gays, mais la révision de la constitution. 

- C'est la l'argument Frigide Barjot dont le moins qu'on puisse dire est qu'il est non seulement qu'il est faux et délibérément diffusé ; 

 

 

2) mais aussi stupide : ce n'est pas une véritable discrimination que la proclamation civile du mariage ne fasse pas état de la possession d'un vagin et d'un pénis par le père et la mère proclamés. Par ailleurs, aucun examen médical des gonades des mariés respectifs n'a jamais été exigé pour se marier ! On fait mine de découvrir quelque chose qui n'a jamais gêné personne. Et heureusement d'ailleurs, on peut se marier sans être père ou mère... F. Barjot devrait donc au moins reconnaître qu'elle n'est pas contre le mariage gay, mais contre la PMA et aller se refaire l'amour avec ses doigts. 

En outre, je doute que même les prêtre qui marient à l'église exigent un certificat du gynéco et de l'urologue avant d'ordonner la cérémonie – alors pourquoi voudrait-on que la loi fasse mieux que le pape ?! Le plus drôle est que cet argument a été considéré comme une véritable arme de communication et ne pas être appelé père et mère dans les textes de lois comme une insulte suprême. Suis-je en droit d'exiger que la loi me reconnaisse comme brun, mauvais pianiste mais super bon coup au lit ? 

 

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Des vieux pas drôles et des slogans pourris.

 

Mais pour les pro-mariage, le véritable coupable qu'ils sont en droit de pointer du doigt sont les personnages politiques qui se sont présentés et se sont fait élire en promettant le mariage gay, et qui ne le font pas : les socialistes.

Leur argument ultime est d'une rouerie rarement entendue. Il ne faudrait pas se concentrer sur le sociétal (c'est trop facile), mais sur le social (là, il y a de la difficulté et une véritable lutte politique à mener). D'abord, si cette loi est si simple à défendre, les socialistes la défendent, la font passer, et on n'en parle plus. Occasionnellement, ils peuvent même commencer à faire leur coming out, et défendre les gays et venir aux manifs avec des slogans un peu moins nazes... Dire qu'une chose est si évidente qu'on devrait s'interdire de la réaliser est idiot tant qu'on n'est pas en train de sacrifier quoi que ce soit pour la mettre en oeuvre. 

Mais justement les attaques sont plus pernicieuses. Elles viennent de certains députés, ou de soi-disant "figures de gauche" (comme Eric Naulleau, ou d'autres artistes comme Régis Jauffret) qui n'ont de "gauche" que l'automatisme consistant à appeler "lamentable" tout ce avec quoi ils ne sont pas d'accord. Ils sous-entendent que le gouvernement ne s'occupe plus des ouvriers, mais des "outsiders" : les minorités culturelles ou sexuelles et les femmes sont la vraie priorité du gouvernement. La stratégie de la campagne d'Hollande conseillée par Terra Nova a été assez explicite sur ce point. Mais le premier problème est que la réalité ne correspond pas du tout à la stratégie. La politique anti-discriminatoire de la France a toujours été et reste catastrophique (Nous sommes pour l'anecdote à la 127ème place en matière d'égalité salariale homme/femme, sur 134 : http://lexpansion.lexpress.fr/economie/la-france-chute-derriere-le-kazakhstan-dans-l-egalite-hommes-femmes_240561.html). Qui plus est, les gouvernements de gauche n'ont pas attendu le mariage gay pour se casser les dents sur l'économie (rappelons la libéralisation de 1983). Autrement dit, les arguments du sociétal versus le social semble étrangement inopportuns. Là encore, on ne discute pas du mariage gay, on attaque les "bobos parisiens". Dieu sait si je me méfie du jacobinisme, mais quand tout le monde est si unanimement rassemblés autour du massacre d'une figure sociologique aussi indistincte que le "bobo", on ne peut pas ne pas penser qu'un truc cloche. Haine des élites, culpabilité pour avoir laissé tomber les classes ouvrières (parce que franchement, Naulleau a fait des trucs pour les classes populaires ?), je ne sais pas, mais ça sent pas bon.

 

 

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Des super slogans...

 

Autrement dit, cher lecteur, tu l'auras compris, on n'a jamais parlé du mariage gay dans le débat sur le mariage gay. Il n'est qu'un prétextes aux insultes homophobes ou au rêve d'une refondation théologique du monde – un monde où le divorce, les abandons d'enfants et les familles ravagées par la connerie humaine n'auraient jamais existé.

Si on me demande l'argument en faveur du mariage gay, je dirai qu'il est d'une étonnante simplicité : on nous le doit. L'argument nouveau n'est pas l'égalité. On peut proclamer l'égalité sans la donner. Et le slogan de "mariage pour tous" est absurde à plus d'un titre. Le scander comme les socialistes le font, c'est tendre le bâton pour se faire battre. 

La nouveauté est que la société a modifié la perception de l'homosexualité : elle n'est plus une maladie ou une perversion. Les homos sont normaux, et à ce titre, ils ont le droit à l'égalité. En fait, ils devraient y avoir droit depuis 1982.

J'ai cherché longtemps si on pouvait dire qu'on était contre le mariage gay sans être homophobe et je ne le crois pas. Les arguments exprimés concrètement ne sont que des variations autour de l'homophobie, revenant à considérer que les homos ne sont pas normaux, moins bons que les autres, ou blesseraient par leur seule existence la majorité de l'humanité. Les religions se sont illustrées sur cette affaire par leur manque absolue de clairvoyance. D'un coup, la bienveillance, la compassion et la compréhension ont tout à fait disparu. Il y a des philosophes catholiques éminents qui sont pour le mariage gay, par exemple Charles Taylor. Juif, musulman ou catho peuvent écouter, comprendre qu'il n'y a aucune différence et dire simplement que l'affaire est réglée. Il y a des gens formidables. Mais encore une fois, je n'ai pas entendu un argument qui fasse fond sur autre chose qu'une définition biaisée de l'homosexualité – et dieu si mon cerveau se liquéfie à force de mater la télé. Autrement dit, pas d'arguments non-homophobes contre le mariage gay. A chaque fois, on ajoute une caractéristique supplémentaire aux homo pour les discréditer : bobo, pervers, mauvais parents etc...

 

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et une bonne ambiance...
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3 octobre 2012 3 03 /10 /octobre /2012 01:00

 

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A quoi peut ressembler la vie d'une relookeuse extrême ? Passer dans une boutique de fringues pour elle, ça doit être comme traverser un hôpital : elle ne voit pas des fringues, mais des chances de rendre les gens laids plus beaux... des chances de sauver des vies !

Pour la relookeuse consciencieuse, relooker autant de moches en ces temps de crise est une tâche herculéenne. En pensant à tous ces smicards et ces bômeurs (chômeurs bobos – nouvel archétype accrocheur placé sur le marché des sciences sociales) moches qu'elle relooke, comment Cristina Cordula fait-elle pour ne pas devenir triste et laide à son tour ? Avec l'expansion folle de l'obsolescence programmée, de la crise, bientôt même les plus beaux d'entre nous auront des fringues mitées, et des sneakers qui se disloquent à chaque pas (car il faut être clair, les sneakers des mecs sont comme les bas nylon Dupont des femmes des années 40 : spécialement programmés pour s'annihiler d'elles-mêmes).

 

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Problème de fringue, mais aussi de déco, on dirait... M6 prête Valérie Damidot à toutes ses vedettes. Y'a rupture de stock sur le bar américain et les murs violets !

 

Heureusement Cristina Cordula ne pense pas que le problème du look soit économique. Si ces femmes et ces hommes sont laids, c'est parce qu'ils ont un juste un problème pour avoir une vie intéressante. Ouf ! La crise n'apparaît pas sur la radar. Et que ce soit dit à chaque ouvrier qui s'apprête à lutter en vain contre la finance : tant que ta vie est intéressante, mon gars, t'as pas besoin de relooking, tu peux continuer à te battre en Kway moche avec une casquette rouge dégueue !

Le titre de son émission contient d'ailleurs une véritable Lebensanschauung : Nouveau look pour une nouvelle vie. La laideur ou la beauté ne sont que des symptômes. Ce qui compte est la vie, la puissance d'agir qui est exprimée par ce look. Autrement dit, le vrai problème est que ta vie est pourrie – en plus d'être moche. D'une certaine façon, postuler l'absolue superficialité du look avait un avantage, si ce dernier était raté, il n'y avait que ça de raté. Maintenant c'est le package entier qu'il faut repenser : look et vie.

Bref, c'est pour ça que les émissions de relooking sont géniales.

 

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Beauté du monde moderne.


Mais le parallélisme vie/look présupposé par C.C. (et qui n'a rien à envier à cet autre parallélisme célèbre entre l'esprit et le corps chez Spinoza) est trop rigide, voire faux. Faites se rencontrer dans votre télé intérieure et mentale Cristina Cordula et Rupaul. Cristina est coolos, elle parle en regardant la caméra comme un vélociraptor frénétique sur le point de manger vos enfants devant vous en vous gardant pour le dessert – l'accent brésilien fait oublier tout ça, mais imaginez-là avec un accent autrichien... Quant à Rupaul, il joue tellement de sa dichotomie homme/femme qu'il va vraiment finir en schizophrène à personnalités multiples. Mais vous mettez ça de côté, y'a pas photo : Rupaul bouffe C.C. comme un vélociraptor dès qu'il s'agit de psychologie et de pédagogie. 

Evil Cristina épuise ses candidats en les faisant défiler pendant 7 heures jusqu'à ce que leur sens de la mode soit aussi broyé qu'un vieux curly sous le coussin du canapé du salon. Le plus drôle dans le dernier épisode que j'ai pu voir, c'est qu'elle-même confessait son absolu désarroi à la fin de la séance d'essayage. Elle n'avait plus de bon sens, je crois même qu'elle avait un oeil qui commençait à dire merde à l'autre. 

 

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L'imaginer avec un accent brésilien.

 

Et pendant ce temps-là, le candidat semblait essayer les mêmes vestes avec les mêmes chemises selon une combinaison toujours légèrement différente (Cristina range ses fringues par catégories "sportswear" / "dandy" / "urbain" etc.). Cristina avait-elle seulement calculé le nombre exponentiel de possibilités à l'avance ?... Elle aurait dû limiter les choix à trois vestes, trois pulls et deux jeans (18 passages possibles en cabines si je sais compter) ? Manque de pot, le candidat geek de l'émission avait soudain pris conscience du potentiel érotique d'un jean skin sur ses jambes rendues ultra-musclées à force de soutenir son large buste. Appelons ça le stade du miroir hétéro bear : quand un jeune pré-trentenaire hétéro prend conscience de son sex-appeal en tant que bear, en pensant que c'est urbain et négligé alors que c'est super gay. Le mec passait devant le miroir sans se lasser, admirer le contraste entre sa barbe amazonienne et l'éclat factice du prêt à porter cordulien.

Ce laxisme improductif, sorte de méthode Stanislawski bis du relooking consistant à épuiser son élève jusqu'au bout pour le changer en simple marionnette, s'accompagne aussitôt d'un fascisme esthétique presque touchant de naïveté. Cristina le dit : pas de robe sous le genou, pas de décolleté carrée si on est grosse, pas de barbe qui cache la pomme d'Adam, etc. Cristina prodigue ses conseils, non parce qu'elle est sympa avec vous, mais parce que ce sont des vérités universelles et sacrées, qui doivent être contemplées pour elles-mêmes dans le grand salon de relooking des idées platoniciennes. Cette forme de manipulation psychologique, n'importe quel bon tortionnaire aurait dû l'importer dans les prisons irakiennes pour faire craquer les détenus. On les ferait défiler dans des cabines d'essayage jusqu'à épuisement, puis on les reconditionnerait en les hyptonisant grâce à un écran géant du sourire de Cristina qui leur crierait "ouh là là  mon chéri, ah oui, ça c'est super ! J'adore le pantalon carotte que tu as tissé avec tes copains prisonniers !"

 

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Ne surtout pas rater le moment où Rupaul parle de ses lavements...

 

Rupaul n'a pas du tout la même approche. Tout vient du dedans, du coeur, de son inner diva... de la force de la fierceness qu'on dégage – en gros, c'est comme les midichloriens de Star Wars, mais avec plein de glitter. Rupaul fait un truc, les femmes au foyer épuisées qui arrivent chez lui entrent dans un monde extraordinaire – pas le monde des normes vestimentaires à la con de Cristina. Et c'est dans ce monde imaginaire – le drag lab "avec plus de perruques colorées et de maquillages à la mode que tous les spectateurs des Hunger Games !" – qu'elles vont devoir trouver un principe qui leur permette de retrouver le goût de se looker, de prendre soin de soi. Quand on dit que ça ne sert à rien de simplement filer un point à un chat affamé et qu'il vaut mieux lui apprendre à pêcher (en lui mettant entre ses adorables petites pattes velues une canne à pêche, et en lui interdisant de miauler trop fort pour ne pas effrayer les poissons) !!! 

 

 

 

Je crois que quelque part dans le monde, les statues de Bouddha confectionnés par les petits moines qui reçoivent le câble auront bientôt la forme androgyne d'un Rupaul. Car Ruru a la même sagesse dialectique de Boubou. Il s'occupe pas vraiment de simples règles vestimentaires. Certes, comme Cristina, il pense que l'apparence est bien le symptôme d'un état de vie (si tu es beau à l'intérieur tu es beau à l'extérieur). Et comme pour Cristina, c'est vrai qu'il propose un choix entre deux tenues à un moment de son show Rupaul Drag U. Mais c'est plutôt toujours ce truc qu'on trouve à la Drag U School, accompagné de licornes et de drags, cette fierceness (férocité) qui est enseignée. Au fond, choisir la bonne tenue n'aurait aucun sens si on n'était pas capable de faire plus, d'être féroce, et de devenir complètement barge, porter des boucles d'oreilles de la taille d'un paquebot et des robes fluos et lumineuses comme seules les méchantes de dessins animés en ont (JEM et les Hologrammes are back BB !!!). Tandis que Cristina apprend à ses disciples comment se transformer en parfait petit Clark Kent assoiffé d'intégration, Ruru apprend comment faire du petit Clark qu'on est déjà un Superman fashion toujours en quête de dépassement. 

La fierceness drag est évidemment la parfaite vertu d'un monde capitaliste où tout le monde est supposé se bouffer la gueule... sauf que c'est aussi en même temps une façon de se foutre de ce monde de dingues et de la compèt' ambiante. Rupaul préviens que le Rupaul Drag U est "comme la vraie vie, une compétition", mais en fait, c'est plutôt une façon de dire "heyy bitch, je fais ce que je veux tellement je suis hors compèt !"

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source.

from the blog : http://mikejoosart.blogspot.fr/2011_08_01_archive.html

 

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5 septembre 2012 3 05 /09 /septembre /2012 20:21

 


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Depuis peu, la vie m'a rendu ma liberté de cheval fougueux, de belette agile, et d'ours hibernateur. Comprenez : je me suis fait relarguer. Dans un souci de respect pour mon tendre ex qui est aussi mon ami, et aussi dans un souci d'impartialité – parce qu'au niveau de généralité où je prévois de m'élever je suis inattaquable, je vais faire les choses simplement : ça allait bien, puis ça n'allait plus très bien, puis bien de nouveau – mais à Montréal –, et enfin très vite, tout n'allait plus bien pour la dernière fois. 

Malheureusement pour moi, mon tendre ex, mon ami, mon merveilleux petit québecois sarcastique (mais si spirituel), espiègle (mais si chou), taquin (mais si plein de sagesse)... est un putain d'existentialiste. Je m'explique, je n'ai pas vraiment relu Sartre pour être capable de dire ça. Mon talent naturel d'expert en criminologie m'a simplement fait remarquer que 1) il y avait "l"existentialisme est un humanisme" posé quelque part dans sa chambre lors de son déménagement ; et que 2)  lorsqu'on a vu Total Recall ensemble(le premier, le vrai, le meilleur), il a immédiatement reconnu dans les paroles du bébé mutant gluant la philosophie de J.P. Sartre. "Les actes seuls déterminent qui tu es vraiment" (et le bébé rend un gros bleurkh d'agonie après, parce qu'il vient de se faire tuer par les méchants, vous vous souvenez...?)

C'est justement parce qu'il est un fieffé existentialiste que je me sens le besoin d'écrire ce petit post (moi, exhiber ma vie gratuitement ? Pfff !). L'ex existentialiste a en effet ceci de particulier qu'il ne vous fournit aucune explication lors des ruptures. Souvenez-vous le bébé mutant. "Les actes seuls déterminent qui je suis vraiment – Bleurkh... " 

 

 


 

 

Au moment fatidique, votre futur ex vous regarde dans les yeux : il est beau, il est intelligent, et il vous parle de rupture – bon, c'est pas vrai, c'est peut-être vous, excédé, qui avait lancé un ultimatum pour lui faire dire pourquoi il était bizarre toute la journée... Peu de temps après, vous commencez à vous souvenir de toute votre histoire, vous pesez ce que vous perdez, et finalement vous demander à ouvrir les négociations. Et c'est là que l'ex existentialiste vous pourrit vraiment la vie. Plus vous évoquez le passé, plus vous lisez au fond de son regard de gazelle sauvage que le passé ne compte pas ; seul le présent, seuls les actes. Et dans le souffle du dernier baiser, vous sentez que sa langue déjà écrit du Sartre en braille sur la vôtre : "L'homme est à inventer chaque jour." L'amour était juste là, dans la pièce quelques jours avant, puis d'un coup, hop, il s'est échappé ou fait écraser comme un mouche en été au milieu d'une salade océane – par hasard, broyée comme ça, entre une crevette et un bout d'avocat au moment de servir la salade.

 

J'ai donc conçu un tableau absolument pas pratique pour catégoriser les différences formes de rupture. 

 

1. Vous êtes responsables :

1.1. Vous l'avez trompé (cause accidentelle suffisante).

1.2. Vous êtes juste chiant (cause essentielle non suffisante).

1.3. Vous avez fait une blague raciste qui n'est pas passée (cause accidentelle non suffisante).

 

 

2. Il est responsable :

2.1. Il ne sait pas ce qu'il veut, et il préférerait sans doute courir après les mecs (cause essentielle suffisante).

2.2. Il n'aime pas jouer à la Wii autant que vous (cause essentielle non suffisante). 

2.3. Il trouve que la ville ou le patelin que vous habitez est totalement mort (cause accidentelle non sufffisante).

 

3. Personne n'est responsable.

 

 

Evidemment il faut clarifier les termes employés dans ce petit schéma. Les causes accidentelles sont celles qui ne dépendent pas de vous, ou de lui. Elles sont ponctuelles. Donc rompre pour cette raison est idiot, puisque le conflit ne pourra être que temporaire. Quant aux causes non suffisantes (superficielles), elles sont des raisons qu'il serait idiot d'avancer à ses amis pour expliquer entièrement la rupture. Genre : je le quitte parce qu'il a vraiment des grands pieds. Ou je le quitte parce qu'il prend comme un accent allemand au moment où il jouit.

A ce stade, je précise qu'évidemment, si vous vous êtes fait larguer (ou si vous avez largué) pour les raisons 1.2, 1.3, ou 2.2 et 2.3, vous avez raison de pleurer à chaudes larmes (ou raison de considérer que vous êtes un salopard). Car ces raisons-ci ne sont pas des raisons solides. Il faut être sérieusement altéré pour en finir sur ces simples prétextes : boire beaucoup, par exemple, ou passer une soirée acharnée à jouer à Naruto Ultimate ninja 2, si bien que le calme et la placidité de la vie d'adultes ne soit plus qu'un doux rêve.

Mais le charme d'une rupture est de voir que généralement, personne n'attaque franchement la seule cause réelle, essentielle et suffisante. Personne ne se contente de dire "bah, voilà, en réalité, toi et moi sommes deux êtres incompatibles, qui ont cheminé ensemble sur l'océan de la vie, comme dans Water World, tu vois, parce qu'il était trop dur de trouver quelqu'un d'autre sur grindr ce soir-là". 

L'incompatibilité est à mon avis la meilleure raison pour une rupture – la plus irréfutable – mais elle est aussi la moins facile à dire. Plus on est longtemps ensemble, plus il devient difficile de dire qu'on était en réalité incompatibles (à moins d'accepter de dire qu'on était hypocrite). Dans les premiers temps, on comprend éventuellement qu'on se méprenne, mais au bout de vingt ans ?... Cette raison est donc réfutée (et chaque jour un peu plus) par le seul fait d'être ensemble. S'être maqué avec quelqu'un ne peut pas justifier de s'en séparer la seconde suivante. A moins de prétendre avoir fait une découverte au sujet du caractère de l'autre qui bouleverse la connaissance que vous en avez !

Et donc arrive forcément le moment où l'on prétend avoir compris quelque chose de super grave et de super nouveau au sujet de son partenaire-vie : qu'il aimait trop les films pornos pour que ce soit honnête, qu'il est en réalité trop immature pour une relation longue depuis qu'il est resté scotché toute une journée sur M6 devant "Ma maison est la plus originale de France", etc. Dans ces moments-là, on emprunte sans scrupules le registre du détective des Experts ou du Colombo psychologue qui pense avoir trouvé l'indice ultime (alors que ce qui était devant nos yeux quelques jours plus tôt ne nous intéressait pas). Mieux vaut savoir bien jouer l'étonnement si vous voulez récupérer tous vos amis communs pour vous.

 

rupture diagramme
un schéma clairement moins cool que le mien.

 

Une rupture c'est finalement ça : se trouver obligé de feindre la découverte d'un élément qui pourtant était présent dès le début (car si cet élément est accidentel, il ne justifiera pas la rupture). Autrement dit, une rupture consiste justement à remonter de 1.3 à 1.2 pour atteindre enfin le climax 1.1 ou 2.2 : "il n'est pas fait pour moi" ! – ce qui implique généralement livraisons expresses et déballage de ses 4-vérités-voire-plus au futur-ex qui en fait n'était pas fait pour vous.

Une dernière solution existe : il faut blâmer très philosophiquement l'existence, le temps qui passe et qui vous échappe (solution 3). Chantez du Léo Ferré si vous en avez la possibilité – marmonnez au moins le refrain autour d'un thé à la menthe. Et même zappez carrément la rupture, car on n'a plus besoin de péter les plombs pour croire à son propre étonnement : on s'est plantés, point. On reste amis. Et n'évitez surtout pas le rebound sex, c'est la meilleure catégorie de sexe qui soit.

 

 

 

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26 juin 2012 2 26 /06 /juin /2012 05:17

 

Grindr logo

source.

 

De retour dans les limbes grinderiennes (les circonstances exactes de ce retour seront élucidées plus tard), il m'est venu à l'esprit un curieux regret, le regret qu'on ne soit plus aux temps des ménestrels et des chevaliers... Je m'explique, je ne suis pas un grand romantique, mais je ne peux pas m'empêcher de penser que ce qui est beau avec le concept d'amour, c'est que lorsqu'il est né, il a clairement été une excuse pour parler longtemps au lieu de coucher. En fait, l'amour a donné une chance aux intellos de draguer (je lève la main au fond de la salle). 

On dit souvent qu'aujourd'hui, une génération de gamins élevés par des écrans lumineux ne font plus que se masturber frénétiquement. Car une civilisation de l'image n'offrirait comme seule perspective de bonheur que celle d'une consommation frénétique de plaisir (je lève la main et je m'auto-désigne comme coupable). Au contraire, la belle civilisation de l'écrit a l'avantage de médiatiser les désirs par la langue, de laisser le temps aux chevaliers du Moyen Âge de chercher des émotions qu'ils ne connaissaient pas, voire même de les inventer pendant leurs temps libres (je baisse les yeux de honte). 

Mais on oppose deux choses qui ne méritent pas réellement qu'on les oppose. Nos réseaux sociaux sont plus larges, et par conséquent, nous n'avons jamais autant eu besoin de savoir écrire. Les images ne suffisent pas, aussi maléfiques et perverses soient-elles. Alors finalement, la meilleure réfutation des millénaristes de l'écriture façon Finkelkraut (ou maintenant Beigbeder) sont les interminables conversations ou débuts de conversations des tchat gay. Plus on est excités par les images, plus on veut baiser, et... plus on a besoin aussi de récolter des informations pour réussir à baiser. 

Le problème pour le pédé lambda devient très mathématique, ou chimique, c'est une question de dosage. Même si on est intéressé, on ne doit jamais trop en dire, alors qu'on n'a jamais autant dragué d'inconnus. Dans ces conditions, si on dépasse les trois lignes, on devient très vite insupportablement collant, relou, car c'est performatif. Ecrire trois lignes, c'est être intéressé, et être intéressé c'est exprimer des sentiments au-delà de toute borne acceptable. A l'inverse, si l'autre renchérit en lignes, il y a de grandes chances pour que ça colle.

 

Grindr mecchiant

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J'ai relu il y a peu les conversations avec mon ex (je viens d'un coup d'élucider les circonstances de mon retour sur grindr). Heureusement, il y a un site qui permet de faire ça. On était drôles, mais très tôt le rapport entre les lignes lues et les lignes écrites a tourné en ma faveur. Comprenez : pour trois lignes, j'en écrivais six, pour six j'en écrivais quinze. Bref, j'étais relou. C'est comme monopoliser le temps de parole pendant un débat, ça ne se fait pas. On ne se connaissait pas, et aussi excité que j'étais de montrer que j'étais un gros nerd, j'aurais pu alléger un peu ma prose. Heureusement, il a renchérit, et placé une vannes super drôle. Et à partir de là, les réparties en ping pong ont été vraiment cool et super hip.

Je repense à ça, et je me vois maintenant galérer, en répétant les mêmes erreurs. Un beau mec apparaît sur la mosaïque de grindr, et c'est tout de suite cinq lignes qui lui tombe dessus... ce qui m'a déjà fait rater de nombreuses prises de contact, dont la plus critique avec un mec sur lequel je fantasmais depuis une dizaine d'années.

Pourtant, autrefois, en supposant qu'on puisse dire "autrefois" en parlant d'un Moyen Âge où l'on possèderait des iphones, j'aurais été un tueur en matière de drague. Mon côté relou m'aurait valu l'admiration des damoiseaux sur la scène internationale de la drague. Ma surenchère permanente aurait pu couper le souffle de la foule attroupée autour de moi, et tenue en haleine au moment où j'écris mes réponses sur grindr. Ils se diraient "oh non, il ne va pas encore ajouter une ligne... Il le fait ? Il le fait, il le fait ! le fou !" Et en voyant mes doigts délicats tapoter sur le clavier, ils s'émerveilleraient de me voir m'épancher si tendrement. Franchement, je crois que j'abuserais de la pose du poignet cassé sur le front simplement pour les impressionner. Sur la plateforme "everyone" de grindr ou sur le "online" international de growlr, les mecs se seraient dit que ma capacité à ressentir un amour si fort que ça en est presque christique. A la fin, on exigerait de moi que je monte sur la croix pour racheter les péchés de l'humanité (ce que je ne concèderais qu'en échange d'un plan à trois avec George Lewis Jr et Teddy Riner).

 

Grindr_amour-courtois.png

Le détail important est la taille de la déclaration que va lui faire le chevalier

(qui ne se rend manifestement pas compte que sa coupe de cheveux est craignos)

 

Mais j'ai beau me sentir un peu incompris dans ma façon d'utiliser grindr (puisque même pour évacuer quelqu'un je lui mets trois lignes et une vanne au bout), j'ai tout de même le sentiment d'être le rescapé d'un mal plus grand encore. On dirait que tous les autres tchatteurs de grindr finissent comme les Frankenstein de La Fiancée de Frankenstein. Ils balbultient "pics ?" "tbm ?" "t où?"... en s'énervant de ne savoir faire que balbutier. Et très vite, ils accusent les autres de ne pas savoir parler. Ils s'auto-accusent en réalité. Et Comme dans le film de James Wale, le monstre finit par s'autodétruire avec le laboratoire... en enterrant le camp, queer et méchant Dr. Pretorius (un vieil aristo bizarre qui se moque de toutes les figures sexuelles classiques en les réduisent et en les mettant dans des pots).

 

 

 

Le résultat concret sont tous ces profils passifs-agressifs du style où des mecs ne font plus que marquer "quels foutages de gueule" ou "ne venez pas me parler si vous n'avez rien à me dire" (tout en ne précisant pas le domaine possible des échanges). Les mecs s'intoxiquent de leurs propres incapacités à communiquer. Si j'en crois également Buffy contre les Vampires (épisode 2 de la saison 2), ou la Fiancée de Frankenstein, la monstruosité entraîne une sorte de demande inextinguible d'amour. Le monstre veut une fiancée, ou le quaterback de Buffy une cheerleader. Et ils finissent tous les deux encore plus malades d'amour qu'au départ, tout en n'apprenant jamais à réellement communiquer. 

 

BOF_To-monsters-and-gods.jpg

 

Il y a peut-être une dernière raison très frankensteinienne et zombiesque à ça. Comme eux, on a des existences de mort-vivants – des existence en sommeil – sur ce genre de tchats. On y traîne, sans forcément s'adresser à tout le monde en permanence. On surveille seulement, et on ne répond que si on tombe sur un mec qui nous plaît, ce qui fait qu'on pourrit à peu près 90% du reste de nos échanges. Le pire se produit si un bogosse apparaît. Il attire à lui tous les suffrages, et en repousse presque la totalité, faisant accroître en un clin d'oeil le taux de frustration de tout le tchat. En insistant une fois pour avoir audience auprès de l'un d'entre eux, il m'a humblement répondu qu'il venait de recevoir 80 messages, que je pouvais essayer de gérer ça, moi, et qu'il n'était donc pas intéressé (mais telle une Charlize Theron en colère contre Blanche Neige, j'avais d'autres arguments à faire valoir). L'expérience est intéressante à tenter. En se connectant sans rien faire, on voit des types laisser des messages, puis d'autres (parce qu'à Paris, le turnover des mecs est très important). C'est comme le sac et le ressac de la mer... Nos désirs se désynchronisent assez naturellement sous l'effet de cette mises en réseau de nos existences en veille. Et on devient de plus en plus indifférents à ces mecs qui pourtant devraient être considérés fraternellement du seul fait qu'ils soient gays, eux aussi.


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25 janvier 2012 3 25 /01 /janvier /2012 02:42

 

 

amour_gants.jpg

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Au moment de raccrocher les gants de la drague sur internet, je ne peux pas m'empêcher d'avoir une pensée émue pour tous ceux qui viennent d'y rentrer. Les jeunes mecs qui s'arrangent des rendez-vous loin de chez eux en pitchant leurs profils web comme la jaquette d'un film Titan. Les mecs timides et romantiques qui vont ressasser mille fois la cruelle règle du net (extension de la règle cruelle de la réalité) : on juge tous sur le physique, et on cherche tous (aussi) du cul. Et ceux qui s'usent les yeux sur les murs de profils et leurs milliers de petites vignettes de mecs, et qui, de fatigue, finissent par cliquer pour de mauvaises raisons sur la photo du mec qui montre un bout de sa bite.

A tous ceux-là, je lègue ma phrase qui tue. Ma période de drague désespérée – qui s'est déroulée dans un état de semi-sidération, les chakras bien ouverts par le ressassement de l'ironie de l'existence – a pris fin. Et il est normal que chacun ait sa chance, bien qu'en vérité seul un petit nombre d'entre nous, stylites du tchat, pourront atteindre ce moment d'absolue ouverture au monde qu'est le pur parcours des beaux gosses du web dans la seule et légère intention de leur faire des compliments et une vanne (y compris sur leurs bites). 

Comme pour toute formule magique ou citation abusive d'écrivains célèbres, il y a des conditions et des avertissements.

Premier avertissement : ma phrase qui tue ne saurait être maniée que par ceux qui ont des intentions pures, parce qu'elle est foutrement romantique. 

Deuxième avertissement : ma phrase qui tue, enfin, doit être utilisée avec précaution, parce que si vous vous comportez comme un chacal après utilisation, il est probable que votre parole et votre crédibilité web fonde comme neige au soleil, ou comme le ferait un toon plongé dans la trempette (comparaison spéciale 80's, en hommage à Roger Rabbit qui était un très bon film, flippant et méchant, et qui a fait de nous tous des grunge flippés par leurs enfance). Vous n'aurez plus de parole du tout, et tout ce que vous direz sera pour la vie accompagné d'un kikoo lol.

 

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Une belle métaphore de la vie – à reproduire en poster pour accrocher chez soi.

 

Voici maintenant ma phrase qui tue – au préalable, vous avez produit toutes les mensurations et autres chiffres d'usage à votre interlocteur (appelons-le Outsidebear28), considéré sournoisement l'état d'urgence sexuelle de Outsidebear28 en vous frottant les mains, et convenu ensemble que les tchats était des lieux de déperdition, et que vous et Outsidebear28 seulement en étiez les rescapés.... alors Outsidebear28 vous demande ce que vous attendez de cette rencontre. Le piège est tendu : soit vous répondez rien, et alors la conversation n'a plus d'intérêt, soit vous répondez que vous cherchez l'amour et alors vous devenez aussi flippant qu'un Freddy Kruger qui courrait après les enfants simplement pour leur faire des bisous. Soudain, vous vous souvenez que vous avez lu la phrase qui tue sur ce site. Et elle vous revient... Alors vous écrivez "Tu sais, Outsidebear28..."

 

"L'amour ne rend pas la vie meilleure, il rend la vie possible." 

 

Explosion de sens tout à coup sur la résosphère. Tous les gays se souviennent soudain qu'ils sont aussi les petits enfants de Proust, de Platon et de cette vieille folle de Socrate. Mais que veut dire cette phrase magique ?

Le contexte. C'est une phrase que prononce le prêtre à David, dans Six feet under – quand ce dernier David est sur le point de quitter Keith (le fou !). So far, la phrase reste plutôt inconnue, sur le web francophone aussi bien qu'anglophone, bien qu'absolument géniale.

 

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Remember Mathew St Patrick...

source.

 

Le paradoxe, c'est qu'à la prendre comme elle vient, cette phrase signifie que l'amour, bien que nécessaire pour vivre, ne change absolument pas la vie. L'amour n'est pas un ticket d'entrée à Disneyland (où Mickey porterait un jockstrap et Dingo serait fétichiste – non plus). Il vous laisse dans votre banlieue rurbaine où vous êtes né. Simplement, vous ne vous suicidez plus. Vous embrassez votre vie telle qu'elle est, avec ses plaisirs réguliers et ses grands moments de flottements qu'on finit tous par trouver poétiques à force de regarder des films de Miyazaki. 

Cool.

Cette phrase est géniale pour une autre raison. Elle rassure tout le monde quant à deux choses : 1) il n'y aura pas de drame, car l'amour n'est pas un bonus de vie, c'est juste la vie, et 2) ça ne sert à rien de faire comme si on était au dessus de tout ça, l'amour et tout... C'est la phrase parfaite pour les gays. Car oui, soit il y a une drama-queen (qui veut être aimé à tout prix) soit il y a un queutard (qui méprise l'amour) en chacun de nous ; et il est même possible de les cumuler par alternance. L'amour, c'est simplement vital. 

Alors, certes, dans la série, la formule a une forte résonance chrétienne. Quand l'amour est partout, c'est aussi Dieu qui est partout... Et aussi, cette formule a quelque chose de sévère et contraignant, puisque le prêtre de Six feet under en tire argument pour que David ne quitte son mec à aucun prix. La relation amoureuse doit primer sur tout le reste (plaisir compris). Mais on n'a pas besoin de souscrire à ces présupposés pour faire fonctionner cette phrase sur les tchats. C'est même plutôt le génie de la série Six Feet Under de voir comment le conseil du prêtre pour un mariage en crise marche soudain très bien pour un gay paumé. 

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3 août 2011 3 03 /08 /août /2011 02:54

 

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Avant, quand on draguait, ça ressemblait à ça. L'avantage c'est qu'on pouvait croiser Al Pacino, comme dans Cruising, de W. Friedkin. 

 

Attention, ce n'est pas encore le manuel de drague parfait. Je prendrai encore un peu de temps avant de pondre ce classique – utilisable par les gays ou les hétéros, les jeunes loups à mèche bourrés en club, ou les cougars célibataires qui ne veulent plus exposer leurs nouvelles couleurs de cheveux sous les spots d'une autre émission de téléréalité. 

Bref, avant le post qui tue, juste un conseil.

Il faut draguer Dés-Es-Pé-Ré, en ayant tout à fait conscience qu'on n'a rien à perdre, et presque rien à gagner. Dans cet état d'esprit, on peut enfin court-circuiter toutes les conversations à la "tu ch ?", "slt", ou "TBM?". Car on peut draguer en vannant, en racontant ce qui nous passe par la tête. Attention, certains le font et en viennent littéralement à chier là où ils mangent en insultant tout le monde, ou en balançant de véritables conneries involontairement homophobes. Non, par "vanne", j'entends "vanne d'intello geek incompris". 

Par exemple, un très bon starter de conversation peut être de raconter ce qu'on est en train de regarder à la télé en ce moment même. Un "dîner presque parfait spécial célibataires" fera l'affaire. Vous vous amusez à déconstruire l'émission avec votre parternaire X de dial. Citer les conneries des candidats entre guillemets. Un célibataire : "Dès que je me suis levé ce matin, j'ai pensé à toi" Réponse de l'intéressée "C'est top !"

Ne pas trop expliquer surtout, mais miser sur la complicité supposé entre deux mecs qui de toute façon se font assez chier à 1h du mat pour mater la télé. J'ai eu un jour une très bonne conversation à partir d'un match de hockey pendant les J.O. d'hiver un jour. Aussi parce que le mec ne s'est pas contenté d'une rafale de "Lol" et qu'il avait un cerveau (mais vous savez déjà que c'est rare... of course, vous lisez ce blog, grâce vous soit rendue !)

Passé quelques échanges selon cette nouvelle manière, le tchat n'est presque plus une conversation, c'est devenu de la poésie, des bouteilles jetées à la mer de l'infosphère. 

Car, de toute façon, sur un tchat, on ne "parle" pas, on "converse" encore moins, on "dial". Et le "dial" c'est le "black" de la discussion internet – l'euphémisme honteux de notre novlangue de pervers virtuels. "Dial" en anglais signifie composer un numéro de téléphone (même pas "parler" ou "téléphoner", les mecs...), au mieux, c'est prendre contact, en "speed dial"... Bref, tout est dit. Ceux qui voulaient trouver l'amour doivent le formuler en vingt mots, pas un de plus (même pas un twitt).  

 

Draguer_Bridget-Riley.jpg

Grâce à B. Riley, on peut commenter tous les motifs de salle de bains des bogosses

qui s'y photographient.

 

Autre exemple, ce soir, un super beau et jeune mec s'était pris en photo derrière une sorte de motif Op'Art. Je lui ai demandé en toute simplicité si c'était un fan du travail de Bridget Riley, et si on pouvait se rencontrer dans une galerie d'art contemporain pour parler de son travail. Oui... oui, je sais. C'est prétentieux, et pédant. Mais on se marre quand le mec répond – ou ne répond pas (ce fut le cas en l'occurence). 

Autre exemple, à un très beau mec (et là je regrette un peu mon coup), après les compliments, j'ai demandé s'il avait besoin d'un mec barbu assorti à son super col roulé rustique... La suffisance de ses deux mots de réponse "là, non" n'ont pas entamé mon enthousiasme. Dans ces cas-là, on se rappelle qu'on a tous un peu de Didier Lestrade en nous, c'est-à-dire qu'on se met juste à tomber amoureux de la beauté de tous ces mecs et se répandre en compliments, sans rien attendre d'autre. C'est magique, dans ces cas-là, vous rétablissez l'équilibre entre le ying et le yang, le Bien et le Mal, et vous jetez direct Gollum au fond du volcan. Vous relisez tout Didier Lestrade, vous lisez son interview dans le seul bon papier des Inrocks spécial sexe de l'été, et vous vous lancez dans cette quête de la beauté absolue à travers Tumblr, Romeisburning (merci Didier pour cette perle), et tous les bogosses du web.

En réalité, draguer sur un tchat, c'est chiant à mourir, et vain la plupart du temps. Donc, autant s'amuser (sans devenir un gros chacal). Parce que même lorsqu'on ne cherche qu'à choper, on reste connecté. C'est comme la télé à 1h du mat, on trouve toujours une rediff potable pour rester scotché encore une bonne heure et demi... 

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  • : Gays and Geeks
  • : Le blog du mec avec qui vous aimeriez parler dans un café de tout et n'importe quoi – mais que vous hésiteriez à rappeler pour en boire un deuxième parce qu'il a quand même l'air flippant et immature. Bref, le blog d'un queutard romantique qui essaie de trouver la paix intérieure et le salut par la culture pop. D'intello qui lit encore Naruto. De fan de Kele Okereke qui n'arrive pas à aimer son dernier album.
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